On entend aujourd'hui par " autorité " une propriété du Pouvoir :
sa légitimité supposée et la dimension symbolique qui le transforme en
Institution. Dans son acception propre, ce mot désigne un acte absolu
qui implique une obligation, et fonde sa relation avec les sujets sur la
subordination et la négation. Subordination lorsque les sujets se
soumettent à la logique de l’autorité toute puissante et
transcendantale, et négation quand ces mêmes sujets commencent à prendre
un chemin parallèle, faisant naître une force égale à celle de
l’autorité en lui réclamant attributions et prérogatives.
En effet, l’autorité tend souvent à conditionner toutes les valeurs
pour justifier ses ambitions et maintenir son hégémonie. Ce qui lui
permet à la fois d’être témoin de tous les phénomènes, détentrice de
leurs destinées et responsable de leurs transformations.
La question de l’ordre reste son atout majeur. C’est à travers lui
qu’elle fonde son discours qui donne à son tour une certaine légitimité à
« l’institution » dans sa dimension unique qui se réclame de la vérité conçue non pas comme un « bien » à partager, mais plutôt comme un objet d’appropriation.
Du coup, l’autorité revêt deux aspects interdépendants : Le premier est un discours qui se manifeste tel un « doux secret »,
permettant à l’autorité de s’infiltrer dans tous les méandres de
l’institution, en prenant tour à tour les formes de principe, de méthode
ou de finalité.
Le second aspect est un acte coercitif qui conçoit toute différence avec les « recommandations »
de l’autorité comme étant une révolte et une insoumission nécessitant
une répression ou, au contraire, une clémence et ce en vue de pérenniser
le « mythe de l’ordre », véritable garant des intérêts du « dominant-vainqueur ».
Ces deux aspects se retrouvent chez Michel Foucault, à travers ce qu’il appelle la « Technologie politique du corps ».
C’est par le moyen de cette notion que Foucault nous explique les
critères qui permettent à l’autorité de mesurer le niveau de fiabilité
des individus appelés à produire dans la soumission, par le biais de
l’assujettissement : « C’est, pour une bonne part, comme force
de production que le corps est investi de rapports de pouvoir et de
domination ; mais, en retour, sa constitution comme force de travail
n’est possible que s’il est pris dans un système d’assujettissement ; le
corps ne devient force utile que s’il est à la fois corps
productif et corps assujetti. »[1]
Mais cet assujettissement ne se réduit pas toujours à la violence, il
peut aussi prendre la forme, plus subtile et plus discrète, d’une
technique ; bref, « d’un art du corps humain »[2]. En fait, le pouvoir produit du réel, notamment l’individu et la connaissance qu’on peut en prendre.
En revanche, là où l’autorité soumet et réprime l’individu, suivant
une logique basée sur une technique infaillible, l’écriture le délivre ;
libérant ainsi ses forces créatrices et le poussant à remettre en cause
les intentions de l’autorité, à critiquer son discours et à saper ses
desseins. L’écriture est, dans ce contexte, un besoin existentiel qui
s’épanouit dans la liberté et se consolide dans la recherche et la
perpétuelle mise en cause des phénomènes.
Dans cette perspective, l’écriture n’est pas une pratique technique,
mais une force qui résiste à toute autre force contraignante, qu’elle
soit matérielle ou symbolique, car elle ne naît pas dans les zones
conscientes soumises à l’autorité et aux lois, mais se crée, comme
l’imaginait Virginia WOOLF, dans le subconscient de l’écrivain[3].
Une longue histoire de lutte et de conflit régissait le rapport entre
l’écriture en tant que concept existentiel et l’autorité - en instance
de légitimité et de reconnaissance - dans sa tendance contraignante
visant à dompter la première et à lui imposer ses diktats. Or l’écriture
cherche toujours à s’émanciper du joug de l’autorité en transgressant
toutes les règles qui peuvent entraver son désir d’autonomie, quitte à
abolir toutes les limites et toutes les contraintes. Roland Barthes
affirme à ce propos que l’écriture est une activité tendant à
s'autonomiser à l'égard des normes utilitaristes et idéologiques[4]. Le plaisir du texte n’exige-t-il pas en définitive le rejet du politique, puisque « le texte est (devrait être) cette personne qui montre son derrière au père politique. »[5] ? L’écriture ainsi conçue n’est-t-elle pas, in fine, le symbole de Prométhée, héros mythologique évocateur de l'hybris (la force démesurée), la folle tentation de l'Homme de se mesurer aux dieux et ainsi de s'élever au-dessus de sa condition ?
Le colloque se veut une réflexion sur la relation conflictuelle et
souvent ambigüe entre autorité et écriture. Son objectif est d’élucider
l’histoire de cette relation, de lever le voile sur sa nature, et d’en
étudier l’impact, que se soit dans le contexte culturel arabe ou
occidental, en ayant recours aux différentes approches
possibles (philosophiques, anthropologiques, sociologiques ou de
critique littéraire) afin de rendre compte de cette relation. A cet
effet, sont proposés à titre suggestif les axes suivants :
-- de l’autorité et de ses diverses manifestations à travers la pensée et la réalité ;
-- l’autorité en tant que système culturel ;
--discours et autorité ;
-- langage et autorité ;
-- les masques de l’autorité ;
-- rhétorique et autorité et/ou rhétorique de l’autorité ;
-- de quelques propositions philosophiques pour déstructurer le mécanisme de l’autorité ;
-- l’écriture comme acte de résistance ;
-- écriture et représentation de l’autorité ;
-- écriture et idéologie ;
-- écriture et principes de gouvernement ou de l’usage de l’écriture en politique ;
-- écriture et défis de liberté ;
-- le poète et le Sultan dans le patrimoine littéraire arabe ;
-- écriture et révolution : limites de la création et de la politique.
Modalités
Les propositions de communication (titre, résumé en français de 2000
signes), ainsi qu’une brève notice biobibliographique (nom, prénom,
affiliation, courriel, intérêts de recherche, titres de publications)
seront à envoyer par mail en format .doc ou .pdf jusqu’au 15 octobre 2013, à l’adresse suivante : autoritecriture@yahoo.fr
Après sélection du comité scientifique les candidats recevront une notification avant le premier novembre 2013.
Pour les propositions retenues, une version préliminaire des communications (30 000 signes) est à envoyer avant le 15 janvier 2014.
Après examen du comité scientifique, les candidats recevront une invitation pour participer au colloque avant le 10 février 2014.
Les langues de communication seront : l’Arabe, le Français et l’Anglais.
L'inscription au colloque est gratuite. Le comité
d’organisation prendra en charge les frais d’hébergement et de
restauration pour la période du déroulement du colloque. Les frais de
transport sont à la charge des participants.
Date et lieu de tenue du colloque : mercredi 12 et jeudi 13 mars 2014 à la Faculté Polydisciplinaire d’Errachidia – Universté Moulay Ismaïl au Maroc.
Formulaire d’enregistrement
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Téléphone
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Institution d’enseignement /d’affiliation
Titre de la communication
Aire thématique
Titres de publications
Résumé
Mots-clés
URL de référence :
http://www.fpe-umi.net
Adresse : BP 512, Boutalamine, Errachidia, Maroc
Téléphone : +212 35 57 00 24 / 35 65 - Fax : +212 35 57 43 07 / 35 88
Phone portable : (+212)6-66-52-67-18
[1] MICHEL FOUCAULT, Surveiller et punir - Naissance de la prison, Paris, Gallimard, coll. « Tel », 2003, p. 34.
[2] Ibid, p. 162.
[3] Virginia Woolf, L’art du roman, traduit par Rose Celli, Paris, Édition du Seuil, 1963, p. 186.
[4] Roland BARTHES, Le degré zéro de l'écriture, Paris, Édition du Seuil, 1953, p. 185 sq.
[5] Id., Le plaisir du texte, Paris, Éditions du Seuil, 1973, p. 84
Responsable : Faculté polydisciplinaire d'Errachidia