Appel à contributions - n° 17 Interférences Littéraires - octobre 2015 - Le Mythe: mode d'emploi
Le mythe mode d’emploi. Pour une nouvelle épistémologie des réécritures littéraires des mythes
s. dir. Franca Bruera & Giulia Boggio Marzet (Università di Torino)
n° 17, octobre 2015
Des années 1960 à nos jours, la critique thématique, la mythanalyse,
la mythocritique, les études sur l’intertextualité et, plus récemment,
la poétique comparée des mythes et la comparaison différentielle n’ont
eu de cesse de s’intéresser aux critères méthodologiques fondant
l’analyse des réécritures littéraires des mythes.
Au sein des études littéraires, au cours de la deuxième moitié du xxe
siècle, les recherches sur les réécritures des mythes ont été soumises à
de profondes transformations. Pour donner une idée synthétique de
l’évolution des débats, une première période a été caractérisée par la
prépondérance d’approches ethno-anthropologiques et philosophiques
(Bachelard, Durand), fondées sur la conception du mythe comme matrice
sémantique invariante. En réaction à ces approches fondatrices, pour
lesquelles le texte littéraire faisait parfois simplement office de
modèle donnant lieu à l’application de méthodes à vocation
universalisante, la recherche s’est tournée vers des outils
méthodologiques plus spécifiquement littéraires et a tendu à étudier les
œuvres pour elles-mêmes. Ce tournant de l’histoire de l’étude des
réécritures mythiques, qui correspond à l’émergence de la mythocritique,
s’est notamment traduit par l’adoption d’une nouvelle terminologie («
mythe littéraire », « thème », « motif ») et de nouvelles notions («
irradiation », « flexibilité », « émergence »). À partir des années
1980, la recherche d’une forme prototypique, voire d’une « essence » des
mythes littéraires a été délaissée au profit des nouvelles perspectives
de la critique thématique (Brémond) et de celles qui, reposant sur une
interaction entre philologie, ethno-anthropologie et sémiotique
(Detienne, Calame, Bollack), réaffirmaient en même temps la spécificité
historique de chaque formulation littéraire d’un mythe. Dans le sillon
des études de Calame, de nouvelles pistes de recherche, axées sur la
poétique comparée des mythes et, plus largement, sur des perspectives
interdisciplinaires, ont vu le jour au cours de cette dernière décennie.
Ainsi Ute Heidmann a-t-elle élaboré ses recherches sur le sujet en
fonction d’une poétique comparative des mythes fondée sur une approche
différentielle qui vise à faire droit à la singularité énonciative de
chaque réécriture.
Depuis quelques années, auprès du Dipartimento di Studi Umanistici de
l’Université de Turin, un groupe de recherche travaille sur le
potentiel herméneutique de l’expérience littéraire, dans une perspective
interdisciplinaire visant à dépasser aussi bien les limites d’un
système logocentrique relevant de la tradition cartésienne et
rationaliste (Derrida), que les contraintes du déconstructionnisme
(Putnam), donc d’une pensée axée sur l’assemblage et l’accumulation au
détriment de la possibilité d’articuler un discours non-fragmentaire. Au
sein de l’ouvrage Beyond Deconstruction from Hermeneutics to Reconstruction (De
Gruyter, 2012, A. Martinengo dir.), qui rassemble les résultats d’une
première phase de recherche sur ces problématiques, la mobilisation des
modèles mythiques dans la littérature est apparue comme un exemple
emblématique de ce dépassement.
S’inscrivant dans le prolongement de ces recherches, le numéro spécial d’Interférences littéraires/Literaire interferenties se
propose de systématiser et d’approfondir les apports théoriques et
méthodologiques des travaux les plus récents à propos des réécritures
littéraires des mythes. Ce projet a pour ambition de contribuer à la
constitution d’une nouvelle épistémologie au sein des études
littéraires. Il s’agira de réunir un ensemble d’articles dont la
vocation sera prioritairement théorique et méthodologique et qui se
fonderont, autant que possible, sur l’étude de cas particuliers. Ces
contributions se donneront pour objectif de formuler de nouvelles voies
pour envisager les enjeux des réécritures des mythes dans le domaine de
la littérature. Ainsi peut-on se demander en quoi consiste la
particularité des réécritures mythiques au regard des autres formes
littéraires. Quels sont les traits typiques du mythe réécrit au regard
de l’identité du discours littéraire ? Comment ces spécificités se
trouvent-t-elle mobilisée dans les œuvres littéraires ? Selon quelles
finalités ? Que nous dit le traitement littéraire des mythes de ce que
la littérature tend à être en tant que discours, mais aussi, plus
largement, en tant que pratique sociale et anthropologique
historiquement déterminée ? Ou encore comment est-il possible d’aborder
le discours mythique face au discours littéraire sans pourtant négliger
les modalités d’énonciation de l’œuvre ? Devant ces questions, il
importe de s’interroger sur les outils qu’il convient de mettre en œuvre
pour rendre compte des enjeux soulevés par les réécritures des mythes
dans la littérature.
Veuillez envoyer vos propositions avant le 15 septembre 2014 à Franca Bruera (franca.bruera@unito.it), Giulia Boggio Marzet (giuliaboggiomarzet@gmail.com) et David Martens (david.martens@arts.kuleuven.be).
Cette proposition comprendra un résumé de plus ou moins 300 mots, ainsi
qu’une courte biographie précisant votre appartenance institutionnelle
et vos domaines de recherche. La sélection des textes sera opérée pour
le 15 octobre 2014. Les articles, d’une longueur de 30.000 à 50.000
signes (espaces et notes compris), seront soumis dans leur version
définitive par voie électronique pour le 25 février 2015.